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5 octobre 2012 5 05 /10 /octobre /2012 18:50

Selon Libération, l'annonce n'a guère enchanté Flammarion. L'éditeur de Christine Angot avait prévenu le jury du prix Sade qu'il ne souhaitait pas que le prix lui soit attribué. Ce qu'on comprend à la lecture de « Une semaine de vacances », à moins de voir dans ce choix des jurés une perversité toute… sadique. Car l'étiquette du prix Sade va au dernier roman de Christine Angot comme le Fémina à Eric Zemmour.

Un article de Frédérique Bréhaut.

Angot.jpg

Depuis la parution de « L'inceste » en 1999, l'écrivain tranche la critique. « Une semaine de vacances » amplifie encore le phénomène Angot. « Chef d’œuvre » pour les uns (Claire Devarrieux -Libération), « texte dopé au Viagra » pour les autres (Didier Jacob -Le Nouvel Obs), laissons les exégètes décider s'il s'agit de littérature avec un grand "L" ou d'un phénomène déjà usé.

Tout a été écrit et dit sur « Une semaine de vacances ». Une interminable fellation dans des décors différents ; un acte technique, mécanique, d'une froideur chirurgicale. Un dentiste soucieux de raconter une extraction de dent à ses étudiants déploierait autant de sensibilité. Que les amateurs de lectures sensuelles en rabattent. Les premiers mots suffisent à tuer tout espoir de volupté tant on reste saisi par la sensation d'étouffement.

Face à la violence, s'absenter de soi

Page 43, une phrase signe l'inceste et ajoute à l'obscénité des scènes qui s'enchaînent, chronique absolue de la prise de pouvoir d'un homme, d'une humiliation disséquée froidement sur 136 pages. Elle silencieuse. Lui, tortionnaire anodin dans les hôtels où ils descendent. Pendant cette semaine de vacances, on le découvre lecteur du "Monde", possesseur d'une 604, de lunettes en écaille, d'une culture germanophile et d'une connaissance affinée de l'art roman. Très monsieur comme il faut en somme, pendant qu'elle, de page en page, se dissout, rencognée dans une passivité muette. Face à la violence, s'absenter de soi.

Sans jamais relâcher un texte sidérant, Christine Angot place son lecteur dans le rôle insupportable du voyeur, complice d'une virée perverse. Au bout du chemin, cette lecture tient de l'épreuve.  Est-ce cela un « chef d’œuvre », pour reprendre l'éloge ? Suffit-il d'asphyxier le lecteur, de le plaquer au mur pour gagner ses galons de grand écrivain? Certes, la radicalité de Christine Angot tranche sur le commun. Et puis?

Suffit-il de créer un malaise continu de la première à la dernière ligne pour signer le grand livre de la rentrée? Christine Angot a la faculté de toucher sans émouvoir. C'est peut-être pour cela que son livre est dispensable.

« Une semaine de vacances » de Christine Angot. 136 pages. 14 €.

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